- C’est une question qui revient tellement souvent !
- Y répondre, c’est retracer l’émergence d’une évidence, tant personnelle que professionnelle.
- Après huit années à accueillir nos clients dans notre restaurant gastronomique, très vite étoilé, à Aix en Provence,
- tout en créant notre vie de famille (assez nombreuse), nous sommes arrivés à un moment de notre histoire où l’on s’est dit « au fond, et pourquoi pas? ».
- Mais reprenons.
- Il y a d’abord eu les premières pierres de l’édifice, celles de cette bastide
- achetée il y a un peu plus de deux ans, que nous avons tout de suite vue avec les yeux de l’amour et la projection d’un avenir, à coup sûr personnel, potentiellement professionnel.
- Bien sûr, il fallait être capable de se projeter en regardant cette bastide où chaque poignée nous restait dans les mains, où l’eau n’était pas vraiment potable et la piscine immense davantage prête à se vider dans la terre qu’à nous permettre de nous rafraichir l’été. L’imaginer sortie de son ambiance de Château de la Belle au Bois Dormant, où le lierre s’immisce partout et où les pierres des chemins sont devenues le terreau d’une végétation omniprésente, dissimulant le charme des fontaines et des rochers savamment agencés à l’origine. Réveiller et façonner la Belle Endormie…
Nous nous sommes jetés dans la restauration de cette maison avec passion et joie.
S’en sont suivis des mois intenses, menant tous les deux de front la vie d’un restaurant étoilé, l’une en salle, l’autre en cuisine, d’une famille de quatre enfants – la dernière n’ayant encore que quelques mois-, et des travaux omniprésents.
Des mois sans s’asseoir, à passer nos coupures et nos week-ends à casser pour mieux reconstruire la cuisine, à chiner les parefeuilles, à repeindre les 15 fenêtres, vider les caves envahies de vieux objets, à refaire une dizaine de paires de volets avant de laisser les autres pour l’avenir, à recomposer les espaces, dessinant progressivement les contours de notre maison rêvée, avec l’énergie et l’exaltation de l’aventure.
Des soirées à imaginer jusque tard dans la nuit, une fois les services au restaurant finis, les prochaines étapes et à bâtir -encore inconsciemment- notre futur écrin professionnel.
Et puis il y a eu ce coup de pouce du destin, et l’opportunité de vendre notre restaurant étoilé,
nous permettant de mettre un terme à cette magnifique étape de notre vie, sur l’année historique. Mais quelle allait être la suite? Le savions-nous vraiment ?
Moi, je rêvais d’un restaurant me permettant de mieux concilier vie professionnelle et vie privée. Je l’imaginais déjà cette table de chef, estivale au bord de la piscine, hivernale au coin du feu de cheminée, sans trop en mesurer les incidences. Quant à Mickaël, il conceptualisait facilement son laboratoire de cuisine, s’imaginait préparer tous ces pâtés en croûte qu’il aurait enfin le temps de décliner, et visiter le monde, pourquoi pas ?
Nous avons donc déménagé le restaurant en tout début d’année,
nous retrouvant du jour au lendemain avec des m3 d’inox à même la pelouse, un capharnaüm de tables, de chaises, d’assiettes, de verres, de casserole en tout genre, remplissant jusqu’à la gueule nos garages et cette page blanche.
Une page à écrire à deux, conformément aux souhaits de chacun. Vaste challenge. Déroutant, un peu terrifiant, pour qui a vécu la frénésie et la mécanique bien huilée d’un restaurant étoilé.
Nous nous sommes jetés à nouveau dans les travaux, cette fois du laboratoire dont nous aurions besoin, quels que soient les projets à venir. A nouveau casser, carreler, peindre, imaginer. S’occuper physiquement et mentalement tout en laissant libre champ à la créativité pour bâtir notre nouveau projet.
Et c’est ainsi que de petits pas en grands aménagements, nous sommes arrivés à l’ouverture, le 6 juin…